Contes de Noël : gare aux loups !

« Le Petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre ChaperonRougeVillage. En passant dans un bois elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger ; mais il n’osa, à cause de quelques Bûcherons qui étaient dans la Forêt. Il lui demanda où elle allait ; la pauvre enfant, qui ne savait pas qu’il est dangereux de s’arrêter à écouter un Loup, lui dit :

— Je vais voir ma Mère-grand, et lui porter une galette avec un petit pot de beurre que ma Mère lui envoie. » Le Petit Chaperon rouge – Charles Perrault

 

« Selon que vous serez puissant ou misérable », dit la fable de Jean de La Fontaine, vous passerez les fêtes de Noël au coin d’un feu crépitant dans une demeure cossu où les mets défileront sur la table familiale. Langoustines, huîtres, foie gras arrosés de vins sublimes chatouilleront vos papilles et vous rempliront copieusement la panse. « Selon que vous serez puissant ou misérable », le chauffage à pas plus de 19° pour ne pas exploser la facture, vous goûterez au foie gras premier prix, vous concocterez un plat copieux parfumé par le court-bouillon. Un effort sera fait sur le vin pour contenter les anciens. Vous tirerez la rallonge de la table qui diminuera d’autant l’espace du salon. « Selon que vous serez puissant ou misérable », vous passerez à votre façon un moment chaleureux baignant dans la magie de Noël rappelant aux plus jeunes les contes de votre enfance.

Dans toutes ces histoires, un austère personnage terrorise petits et grands tapi dans l’ombre de nos peurs : le loup ! Entre le XVIIè et le XIXe siècle, les contes qui s’écrivent seront le socle d’une culture commune en Europe. Le loup est un personnage central, « prédateur cruel, prêt à tout manger », rappelle justement Wikipedia. A l’approche de 2015, le loup agite toujours autant la machine à fantasmes, exutoire de nos angoisses.

Les grands prédateurs sont de retour

En Europe, on assiste au retour des grands prédateurs comme l’explique une récente étude de la revue scientifique Science. 76 chercheurs de 26 pays ont travaillé conjointement pour définir les populations de loups, ours, lynx et gloutons qui étaient en passe de disparaître du continent entre les années 1950 et 1970, rappelle l’étude citée par Humanité et biodiversité. « Un tiers de l’Europe continentale abrite au moins une espèce de grand carnivore, avec des populations en croissance pour le XXIe siècle », expliquent-ils.

Loups

Pour en arriver là, il a fallu un plan global de conservation des espèces s’appuyant sur « une législation protectrice, l’opinion publique favorable, et une variété de pratiques permettant la coexistence entre les grands carnivores et les humains. La situation européenne révèle que les grands carnivores et les gens peuvent partager le même paysage. » La prise de conscience vient des années 1970 où ont lieu les premiers mouvements de protection de l’environnement. Un écho à l’actualité : peut-être que dans quarante ans, tout le monde se gargarisera des espaces et espèces protégés sur les sites de Notre-Dame-des-Landes (projet d’aéroport), Sivens (projet de barrage) et Roybon (projet Center Parc).

La conclusion est donc que « les grands carnivores et les hommes peuvent partager le même espace », ce qui ne manquera pas de faire grincer les dents de quelques homo sapiens. La cohabitation entre l’homme et ces prédateurs restent un enjeu. La peur du loup encore et toujours. « Des problèmes subsistent, car la densité de population humaine et nos activités engendrent des conflits », explique Humanité et biodiversité avant de conclure : « Retenons cependant que même si elles sont très loin d’avoir retrouvé leur abondance d’antan, ces espèces sont aujourd’hui « stables ou en augmentation » dans la plupart des pays. »

 

Pet_Chap_Rge_G_Doré_1867« Le Petit Chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du Loup eut peur d’abord, mais croyant que sa Mère-grand était enrhumée, répondit :

— C’est votre fille le Petit Chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma Mère vous envoie.

Le Loup lui cria en adoucissant un peu sa voix :

— Tire la chevillette, la bobinette cherra.

Le Petit Chaperon rouge tira la chevillette, et la porte s’ouvrit. Le Loup, la voyant entrer lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture :

— Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et viens te coucher avec moi.

Le Petit Chaperon rouge se déshabille, et va se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment sa Mère-grand était faite en son déshabillé. Elle lui dit :

— Ma mère-grand, que vous avez de grands bras ?

— C’est pour mieux t’embrasser, ma fille.

— Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes ?

— C’est pour mieux courir, mon enfant.

— Ma mère-grand, que vous avez de grandes oreilles ?

— C’est pour mieux écouter, mon enfant.

— Ma mère-grand, que vous avez de grands yeux ?

— C’est pour mieux voir, mon enfant.

— Ma mère-grand, que vous avez de grandes dents ?

— C’est pour te manger.

Et en disant ces mots, ce méchant Loup se jeta sur le Petit Chaperon rouge, et la mangea. » Le Petit Chaperon rouge – Charles Perrault

 

 Les loups sont partout !

« Selon que vous serez puissant ou misérable », vous serez loup ou agneau. Dans la vie sociale où se joue chaque jour de véritables contes des temps modernes, les prédateurs sont à l’affut. Ils guettent, rusent et attaquent leurs proies sans que paraisse aucune violence. Ainsi, une meute bien organisée et solidaire vient de s’emparer de 39 milliards d’euros ! Ceux-ci ne s’épuisent pas de durs labeurs et cela huit heures par jours. Non, ils se repaissent du travail des autres. Et en 2015, ils se gaveront donc de 39 milliards d’euros de dividendes. Cette race-là est désormais célèbre. Ce sont les actionnaires.

SmicPlus largement, le monde de la Finance a asservi le monde social, et plus grave, la démocratie, à ses objectifs cupides d’accumulation de la richesse. Pendant que 39 milliards d’euros s’entassent sur les comptes bancaires, celles et ceux qui en sont à l’origine, les salarié-e-s créant la valeur ajoutée, se contenteront d’une augmentation du Smic de 0,8% sans aucun coup de pouce. C’est bien l’ensemble des salarié-e-s qui est concerné : moins le Smic augmentera, plus les salaires se situant au-dessus stagneront.

La démocratie est effectivement en danger. Ainsi, de jeunes loups s’emparent des lieux de pouvoir. Le Ministre Macron est le parfait exemple de ce système prédateur. Par la force de la loi, il veut réduire à néant des siècles de lutte sociale avec la loi qui porte son nom. Un ancien Ministre, figure du Parti socialiste, Pierre Joxe, s’en est largement offusqué. Pour lui, c’est « ahurissant », confie-t-il à Médiapart. Joxe accuse Macron de « déconstru(ire) le droit social », « le droit du travail est en miettes », poursuit-il. « La gauche dans son programme n’a jamais envisagé des réformes du droit du travail du genre de celles qui sont aujourd’hui à l’ordre du jour. (…) On est à contre-emploi de notre histoire (…), (du) sens de l’histoire de la gauche », dit Joxe expliquant que « le développement du travail du dimanche (…) est exclusivement destiné aux intérêts des groupes de la grande distribution ».

Loup-WaalStreet

Comme dans les contes de Perrault, ces loups s’apprêtent à manger tout cru des hordes d’agneaux. Pour leur salut, pourvu que ces derniers arrêtent de se comporter en moutons.

 

« Je dis le Loup, car tous les Loups ne sont pas de la même sorte ;

Il en est d’une humeur accorte,

Sans bruit, sans fiel et sans courroux,

Qui privés, complaisants et doux,

Suivent les jeunes Demoiselles

Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ;

Mais hélas ! qui ne sait que ces loups doucereux,

De tous les loups sont les plus dangereux. » Le Petit Chaperon rouge – Charles Perrault


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