Il y a sept mois, une petite bête a fait de Montpellier un centre épidémiologique et médiatique. Le responsable ? Le moustique tigre qui délivre chikungunya et dengue et qui avait alors semé la panique dans la ville. Des habitant-e-s ont effectivement été contaminé-e-s par le chikungunya. Désormais, l’animal piqueur est bien installé et d’après l’Institut de veille sanitaire (I.N.V.S.), l’agglomération de Montpellier va devoir s’habituer à sa présence. Et tout faire pour prévenir de nouvelles contaminations.
« L’état d’urgence est décrété pour notre territoire », dit Perla Danan, élue à la métropole de Montpellier, rapporte Midi Libre (30/04/15). Montpellier est « une terre de résistance », assure même Philippe Saurel, maire et président de Montpellier métropole. Les élus seraient-ils vent debout pour défendre la santé de leurs administrés face à l’envahisseur zébré qu’est le moustique tigre ? Pas vraiment même si cela a un lien. Lors du dernier conseil de métropole du 28 avril dernier, Jacques Domergue (UMP) a été à l’origine d’un vœu qui a été voté unanimement : « Vœu pour le maintien de la Direction Régionale de l’Agence Régionale de la Santé (ARS) sur Montpellier Méditerranée Métropole ». « Perdre l’ARS serait le signe du déclin de Montpellier », a prédit l’élu-docteur Domergue. Et attention, si l’ARS, comme beaucoup d’administrations, s’en allait vers Toulouse dans le cadre de la fusion des régions, « Jacques Domergue est même prêt « à descendre dans la rue » ». Pour le coup, les élu-e-s de la métropole ont eu le nez fin. Effectivement, le matin même de ce conseil, l’Institut de veille sanitaire (INVS) publiait un Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) où Montpellier occupait toute sa place. À la lecture du document titré : « Dengue et chikungunya en France métropolitaine, une surveillance nécessaire », il serait effectivement bien que Montpellier conserve au moins l’ARS. Car, côté santé publique, l’avenir s’annonce piquant.
Santé publique menacée
« Désormais, en France métropolitaine, toutes les conditions sont réunies pour que les virus du chikungunya et de la dengue circulent. » Yvon Perrin, chercheur au Centre national d’expertise sur les vecteurs à Montpellier, y va franco dans les colonnes de La Gazette des communes. Se référant à l’épisode contagieux montpelliérain de l’année dernière, il conclut que « ce type d’événement se répètera sans aucun doute à l’avenir. »
« En octobre 2014, 12 cas autochtones de chikungunya (11 cas confirmés et 1 cas probable) sont survenus à
Montpellier (quartier Las Sorbes, ndlr) », rappelle le Bulletin épidémiologique hebdomadaire n°13-14 de l’INVS du 28 avril dernier. Aedes albopictus, plus connu sous le nom de moustique tigre, a colonisé la ville depuis 2010. « Un cas importé du Cameroun, vivant dans le même quartier que les cas autochtones, a été identifié comme le cas index », explique l’INVS pour qui cela constitue le « premier foyer d’importance en Europe depuis l’épidémie de 2007 en Italie (…) Cet épisode rappelle que le risque d’épidémie de chikungunya est bien réel pour la population européenne. »
Chikungunya et dengue sont reconnus comme « une menace pour la santé publique en France métropolitaine depuis plusieurs années, du fait de la présence des conditions nécessaires à une transmission autochtone dans plusieurs régions ». Le vecteur est le moustique tigre introduit en 2004 sur la côte méditerranéenne et qui a depuis essaimé dans dix-huit départements. À Montpellier, les premiers moustiques tigre sont identifiés en 2010 et depuis il a « progressivement colonisé l’ensemble de l’agglomération ». L’INVS constate que « le virus est régulièrement introduit sur le territoire par des voyageurs de retour de zone endémo-épidémiques » et que « la population française n’est globalement pas immunisée contre ce virus. »
Jungle urbaine
D’autres facteurs font le lit de l’animal : les conditions de vie en milieu urbain. L’INVS a fait une enquête poussée sur les contaminations montpelliéraines de l’automne 2014. Ainsi, le 1er octobre, un cas suspect est détecté. « La patiente (…) n’avait pas voyagé récemment, mais s’était rendue 4 jours avant le début des signes dans un quartier résidentiel de Montpellier (400 000 habitants) où elle avait été piquée par des moustiques », énonce l’INVS. Quinze jours plus tard, quatre adultes d’une même famille consultent présentant « une symptomatologie évocatrice de chikungunya sans notion de voyage associée. Cette famille résidait à environ 150 mètres des lieux visités par la première patiente ».
Les services de l’État se mettent alors en branle en engageant une recherche active sur l’agglomération de Montpellier : enquête en porte-à-porte dans le quartier incriminé dans un rayon de 200 mètres ; 1 000 foyers investigués soit 2 250 habitants ; passage au peigne fin des crèches et des groupes scolaires et mobilisation des professionnels de santé (médecins généralistes, laboratoires d’analyses et les six établissements de santé siège d’urgence).
Résultat de l’investigation : 20 cas suspects autochtones de chikungunya ont été identifiés dans le quartier dont 6 seront confirmés. « Au total, 12 cas autochtones de chikungunya ont été identifiés : 11 cas confirmés et 1 cas probable », conclut l’INVS. 75% des cas se sont rétablis dans les huit jours. Plus peur que de mal. Un élément leur est commun : « Tous habitaient ou avaient fréquenté un même quartier résidentiel densément peuplé de Montpellier (un carré de 250 m de côté), composé de petits immeubles et de maisons individuelles avec de nombreux jardins. »
Pour l’INVS, à ce moment-là à Montpellier, les ingrédients du cocktail explosif du chikungunya étaient réunis : « un quartier densément peuplé par une population non immunisée contre le CHIKV (chikungunya virus, ndlr) ; la présence du moustique Ae. albopictus en fortes densités, favorisée par les conditions climatiques et les nombreux jardins du quartier, fournissant gîtes larvaires et lieux de repos aux moustiques ». S’ensuit « l’introduction d’une souche de CHIKV par un voyageur virémique » et le fait que presque aucun des « médecins consultés par les cas n’a évoqué le diagnostic, le chikungunya étant une maladie rare en France métropolitaine. »
Combattre le moustique tigre
Pour les chercheurs de l’INVS, dans les conditions climatiques similaires à l’automne 2014, « de nouveaux épisodes de transmission du virus du chikungunya ou de la dengue (…) pourront se produire, et ce d’autant plus que le vecteur étend toujours davantage sa zone de colonisation. » Ainsi, « à court terme, c’est la mobilisation de l’ensemble de la société, et en particulier du grand public, qui constitue le principal défi. À moyen ou plus long terme, les attentes sont fortes en termes de méthodes de lutte plus sélectives », concluent-ils sans manquer de rappeler que « l’émergence de ces maladies en métropole ne doit pas occulter le fait qu’en France, ce sont les départements et collectivités d’outremer qui restent les plus exposés, avec des épisodes épidémiques d’une toute autre dimension, tant en fréquence qu’en intensité. »
Du côté de Montpellier, les propos des chercheurs laissent perplexes. Ainsi, « nous sommes démunis et nous n’avons rien pour combattre le tigre efficacement », explique à Midi Libre Frédéric Simard (03/05/15) de l’Institut de recherche pour le développement (IRD). D’après lui, » « les comportements doivent changer ». Comprendre: il faut vider tout endroit pouvant contenir de l’eau chez soi », traduit Midi Libre. Quand on sait qu’une simple coquille d’escargot vide peut faire office de gîte au moustique tigre et qu’ « en un mois de vie, un seul moustique tigre pond 200 œufs… », les efforts d’information vont devoir être considérables surtout « que 80% à 90% des tigres élisent domicile chez le particulier. »
La balle est donc dans le camp des élus de la métropole de Montpellier qui sont pour le moment occupés à pousser des cris d’orfraie. Ils sont bien les derniers à se rendre compte que Montpellier va se vider des principales administrations au profit de la Ville rose. « 3 000 fonctionnaires pourraient quitter le Languedoc-Roussillon », annonce France 3 LR. Alors, comment dans un tel contexte austéritaire où les personnels émigrent et où les budgets publics fondent comme neige au soleil la métropole de Montpellier pourra-t-elle efficacement lutter contre le moustique tigre et ses contaminations de chikungunya ? La question reste entière. Et il est malheureusement à parier que si de nouvelles contaminations devaient avoir lieu, cela toucheraient les quartiers les plus précaires de la ville. En attendant, c’est aux mairies de la métropole de rester vigilantes quant à leurs parcs et jardins en attendant, comme le préconise l’INVS, une grande campagne d’information du grand public sur les enjeux du moustique tigre. Ce serait plus utile que la débauche de communication autour des campagnes « Halte à la fraude » dans le tramway et des conseils de quartier qui ressemblent, pour le moment, à des coquilles vides. De nouveaux gîtes qui feront le bonheur du moustique tigre.
Crédit photo de Une : Wikipedia
C est assez vague comme conseil de lutte….qu on nous dise quel est le produit le plus efficace qu on puisse employer ….et que est ce qu on peut faire lorsqu on a un bebe de 2 ans qui est en permanence dans le jardin….la citronnelle est elle efficace. …..
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